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Catalogue de livres et manuscrits provenant de la bibliothèque de M. André Gide
LA “VENTE VENDETTA” D’ANDRÉ GIDE.
VOLUME RÉUNISSANT UN ENSEMBLE DE CORRESPONDANCES, D’ÉPREUVES ET DE DOCUMENTS AUTOUR DE LA FAMEUSE VENTE QU’ANDRÉ GIDE ORGANISA LUI-MÊME, AVANT SON DÉPART POUR LE CONGO.
AVEC UN EXEMPLAIRE DE TÊTE SUR ARCHES DU CATALOGUE, LE N° 1
In-folio (315 x 250 mm)
CONTENU :
I. Catalogue
Catalogue de livres et manuscrits provenant de la bibliothèque de M. André Gide. Paris, Librairie ancienne Honoré Champion, Édouard Champion, 1925. ÉDITION ORIGINALE. In-8 (250 x 170 mm). (2) ff., 71 pp., (1) f. Un des 35 EXEMPLAIRES DE TÊTE sur Arches, celui-ci numéroté 1, seul grand papier. Entièrement monté sur onglets, plats de couverture conservés
II. Épreuves
– (1) : épreuves complètes, abondamment corrigées par l’éditeur, non datées, 63 pp. in-8
– (2) : épreuves complètes, CORRIGÉES PAR ANDRÉ GIDE et l’éditeur, datées du 3 mars 1925, cachet de l’imprimerie Dumoulin à Paris, 62 pp. in-8 imprimées au recto seul
– (3) : épreuves complètes, CORRIGÉES PAR ANDRÉ GIDE, datées du 19 mars 1925, cachet de l’imprimerie Dumoulin à Paris, 71 pp. in-8
– (4) : épreuves des 4 premiers feuillets, corrigées par l'éditeur, datées du 19 mars 1925, cachet de l’imprimerie Dumoulin à Paris, 8 pp. in-8
– (5) : 2 épreuves partielles, sans corrections, des lots 363 à 405, datées du 2 avril 1925, cachet de l’imprimerie Dumoulin à Paris, 16 pp. in-8
– (6) : épreuves partielles, corrigées par l’éditeur, des lots 384 à 403, non datées, 3 pp. in-8
– (7) : un feuillet autographe de l’éditeur donnant l’ordre des vacations, 1 p. in-8 au crayon
III. Correspondances
10 lettres autographes signées d’André Gide à Édouard Champion :
– (1) : “je vous écris pour vous confirmer mon intention de vendre une partie importante de ma bibliothèque… ”, [s.l.], 17 janvier 1925, 1 p. in-8 volante, papier vergé
– (2) : “si vous ne jugez pas l’époque trop tardive, je préférerais après la semaine sainte… ”, Roquebrune, 8 février 1925, 1 p. in-8, papier pelure, enveloppe
– (3) : “je reçois votre lettre. Voici la préface – considérablement réécrite… ”, Bastide Franco, Brignoles, 25 février 1925, 1 p. in-8, papier pelure, enveloppe. Au verso : TAPUSCRIT DE LA PRÉFACE du catalogue, signé à l’encre par André Gide, une dizaine de corrections autographes à l’encre
– (4) : “voici les épreuves avec corrections. Vous voudrez bien y ajouter les vôtres. Le tout demande à être revu soigneusement… ”, Bastide Franco, Brignoles, 8 mars 1925, 1 p. in-8, papier vergé, enveloppe. Pièces jointes : 3 pp. in-8 autographes intitulées “Questions et remarques”, même papier vergé
– (5) : “je reçois les épreuves et les revois en grande hâte. Certaines de mes indications n’ont pas été suivies… ”, Bastide Franco, Brignoles, 23 mars 1925, 2 pp. in-8, papier teinté, enveloppe
– (6) : “je vous ai renvoyé avant-hier les épreuves du catalogue, avec mes corrections… ”, Brignoles, 26 mars 1925, 1 p. in-8, papier teinté
– (7) : “voici une première liste d’adresses pour l’envoi du catalogue… ”, [s.l.], 2 avril [1925], 1 p. in-8, papier fin
– (8) : “la circulaire que vous avez la gentillesse de me communiquer, me revient de quatre côtés. Ils ont dû faire un service monstre et je m’attends à un joli concert… ”, Hyères, 9 avril 1925, 3 pp. in-8, papier teinté, enveloppe
– (9) : “ci joint le supplément de liste, que je retrouve… ”, [s.l.], 13 avril 1925, 3 pp. in-12, papier fin ligné, enveloppe
– (10) : “je me reproche beaucoup d’être parti sans vous revoir… ”, [vers Dakar], 26 juillet [1926], 1 p. in-8, papier teinté, face supérieure de l’enveloppe conservée
– (11) 1 lettre autographe non signée d’André Gide à Paul Souday : “je m’affecte de trouver dans la liste que vous dressez de ceux de mes confrères avec qui j’ai “rompu”, le nom d’un des rares contemporains que j’admire : Paul Claudel… ”, Hyères, 13 avril 1925, 2 pp. in-8, papier teinté, enveloppe adressée à Édouard Champion
– (12) 1 télégramme d’André Gide à Édouard Champion : “cent trente mille non compris Whitman je rentre mercredi… ”, Brignoles, avril 1925, 1 p. in-12
– (13) 1 brouillon autographe d’André Gide, liste de livres avec ratures, 1 p. in-12, papier quadrillé, enveloppe adressée à Édouard Champion
– (14) 1 brouillon autographe d’André Gide, quatre lignes intitulées “Suarès”, 1 p. in-8, papier ligné vergé, grande enveloppe adressée à Édouard Champion
– (15) 2 télégrammes de Sarkissian à Édouard Champion : (1) : “si possibilité acquérir amiable toute bibliothèque Gide cablez meilleur prix global… ” ; (2) : “je renonce… ”, Alexandrie, [1925], 2 pp. in-12
– (16) questionnaire tapuscrit envoyé par la revue La Vie pour l’enquête de bibliophilie lancée par Maurice Heine, 1 p. in-8, papier à en-tête de la revue, enveloppe adressée à Édouard Champion
– (17) 5 cartes et 1 lettre autographes signées de Jacques Doucet à Édouard Champion : (1) : “tous mes vœux cher ami et mes remerciements pour l’envoi du Gide… ” ; (2) : “merci pour Gide. Avec mes meilleurs vœux… ”, 2 pp. in-16, [Paris], cartes de visite, 1er janvier 1924, faces supérieures des enveloppes conservées ; (3) : “pour la vente G*** dont vous m’avez parlé ce matin qui m’intéresse énormément est-ce que vous vous chargez des commissions ?… ” ; (4) : “mon secrétaire a dû faire le nécessaire pour solder mon petit compte comme convenu… ” ; (5) : “Oui avec plaisir le volume de Smith College Studies in Modern Language par Albert Shinz… ” ; (6) : “merci de me l’avoir proposé et excusez-moi de ne pas le garder mais je suis en grande brouille avec les œuvres de Gide. Ma bibliothèque a horreur des Gide… ”, 4 pp. in-12 et 1 p. in-8, [Paris], 28, 30 et 31 janvier 1925, en-têtes du “46, avenue du Bois-de-Boulogne”, une enveloppe
– (18) 1 lettre autographe signée de Bernard Faÿ à André Gide : “je suis bien indiscret. Tout de même venant de voir vos livres chez Champion je me permets de vous dire qu’à mon avis le W. Whitman a une grosse valeur… ”, [Paris], 20 mars 1925, 1 p. in-8, papier fin à en-tête du “11, rue Saint-Florentin”, liseré de deuil
– (19) 1 lettre autographe signée de Paul Souday à Édouard Champion : “pourrais-je avoir – tout de suite – un exemplaire du catalogue de la vente André Gide, avec sa préface ?… ”, [Paris], 9 avril 1925, 1 p. in-16, au crayon, enveloppe
– (20) 1 lettre autographe signée de Valery Larbaud à Édouard Champion : “j’aurais voulu t’écrire plus tôt, mais ma mère a été malade et j’ai été très dérangé depuis mon départ de Paris… ”, Valbois, lundi soir [31 mars 1925], 1 p. in-8, papier bleu, enveloppe. Pièces jointes : 3 pp. in-8 autographes, précisions bibliographiques sur Whitman, papier pelure bleu
– (21) 2 lettres autographes signées de Roger Martin du Gard à Édouard Champion : (1) “j’aurais grande envie de l’exemplaire de l’Éducation sentimentale, qui sera vendu avec la bibliothèque d’André Gide… ” ; (2) : “je suis confus de vous avoir dérangé pour l’Éducation sentimentale de la vente Gide. Je ne pensais pas que cela dépasserait 200 francs… ”, Le Mée, 20 et 23 avril 1925, 3 pp. in-12, papier fin à liseré de deuil, enveloppes
– (22) 3 lettres tapuscrites, anonymes et non signées : 2 adressées à Albert Schinz et 1 à Jacques Doucet, à propos d’un volume sur le Dadaïsme, 3 pp. in-8, papier pelure
– (23) 1 lettre autographe signée de Marius Leblond à Édouard Champion : “je vous fais envoyer immédiatement à votre adresse le numéro du 1er mai sur l’enquête Gide que nous donnons dans la Vie… ”, Paris, 15 mai 1925, 1 p. in-8, papier à en-tête de La Vie, face supérieure de l’enveloppe conservée
– (24) 1 lettre autographe signée de René Puaux à Édouard Champion : “merci de votre lettre. Si l’Annonciation me vaut le plaisir de faire votre connaissance… ”, [Paris], 1 p. in-16, papier à en-tête du “19, place de la Madeleine”, face supérieure de l’enveloppe conservée
IV. Documents
– (1) : pages 157-168, 187-190 des numéros des 1er, 15 mai et 1er juin 1925 de la revue La Vie, comprenant l’Enquête sur les livres de M. André Gide menée par Maurice Heine, soit 16 pp. en tout
– (2) : diverses coupures de presse relatives à la vente par René Maran, Henri Béraud, Gérard Bauër, Roger Valbelle et deux anonymes, 6 pp. en tout, formats divers
– (3) : encart publicitaire, intitulé “Une suite à la Vente de M. André Gide”, donnant une liste de cinq livres de Gide vendus par Eugène Montfort, 1 p. in-8
– (4) : 2 feuillets extraits du Catalogue de la bibliothèque Jouinot-Gambetta (Paris, Andrieux, 1925, pp. 3-6), comprenant la préface de Claude Farrère où une allusion est faite à la vente Gide sans la nommer, 4 pp. in-8
RELIURE SIGNÉE DE CANAPE. Dos à nerfs et coins de maroquin vert, entièrement monté sur onglets
PROVENANCE : Pierre Berès (Paris, I, juillet 2005, n° A-203, 8.500 € sans les frais) -- Pierre Bergé (ex-libris ; Paris, VI, juillet 2022, n° 1450)
Pour financer son voyage au Congo de 1926-1927 avec Marc Allégret, André Gide organisa la vente d’une partie de sa bibliothèque au printemps 1925. Cette “vente vendetta”, selon l’expression de Paul Valéry, fut aussi l’occasion pour Gide de régler quelques comptes. Parmi les 405 lots dispersés à l’Hôtel Drouot les lundi 27 et mardi 28 avril 1925, on trouve “tous les amis de trente ans qui s’étaient détachés de lui et le montraient du doigt” (F. Lestringant), au premier rang desquels : Francis Jammes, Pierre Louÿs, Maurice Maeterlinck, Henri de Régnier, André Suarès. Gide n’expliquait qu’à mots couverts les raisons de cette vente dans la préface :
“Le goût de la propriété n’a, chez moi, jamais été bien vif. Il me paraît que la plupart de nos possessions sur cette terre sont moins faites pour augmenter notre joie, que nos regrets de devoir un jour les quitter. Au surplus, peu soigneux, j’ai sans cesse la crainte que les objets que je détiens ainsi ne s’abîment ; qu’ils ne s’abîment davantage encore si, partant en voyage, je les abandonne longtemps. Projetant une longue absence, j’ai donc pris le parti de me séparer de livres acquis en un temps où j’étais moins sage, que je ne conservais que par faste ; d’autres enfin qui me sont demeurés chers entre tous aussi longtemps qu’ils n’éveillaient en moi que des souvenirs d’amitié. J’y ajoute les exemplaires que je m’étais réservés de mes premiers livres, dont les éditions originales sont devenues rares. À quoi bon les garder dans une armoire d’où jamais je ne les sortais ? Ils pourront amuser quelques bibliophiles, mieux capables que moi de les apprécier.”
La préface avait été réécrite et très adoucie par Gide, après un premier jet assassin, sur le conseil de Roger Martin du Gard. “La version initiale était un véritable jeu de massacre : Gide prenait à partie chacun de ses ex-amis et lui disait son fait” (F. Lestringant). Gide l’avouera d’ailleurs lui-même plus tard lors de ses entretiens avec Jean Amrouche.
Les plus hautes enchères furent atteintes par l’édition originale de Leaves of Grass de Walt Whitman, 4.800 francs ; Les Chansons de Bilitis de Pierre Louÿs, un des dix chine avec envoi, 3.600 francs ; Pelléas et Mélisande, un des vingt-cinq hollande, 2.700 francs. Néanmoins, Gide fut surpris de constater que ce furent ses propres œuvres qui obtinrent les meilleurs résultats : Si le grain ne meurt, un des douze exemplaires de l’édition hors commerce de 1920-1921, 5.300 francs ; Oscar Wilde, manuscrit autographe sur papier whatman de l’hommage publié dans le Mercure de France en 1910, 4.300 francs ; Les Nourritures terrestres, un des douze hollande, 3.600 francs ; Les Cahiers d’André Walter, exemplaire unique sur chine, 2.700 francs. L’ensemble des livres et manuscrit de Gide produisit 43.245 francs, soit donc plus d’un tiers du total de la vente, qui réalisa 123.000 francs. Gide avait escompté en tout 125.000 francs de cette vente. Il “ne s’était trompé que de bien peu. Mais il avait estimé certains livres trop haut et tous les siens trop bas” (F. Lestringant citant Maria Van Rysselberghe et les Cahiers de la petite dame).
Par cette “mise au net”, Gide entendait enterrer une certaine conception de la littérature, “fétichiste et salonnarde”, celle des temps du symbolisme. Il ne sacrifiait cependant ni Paul Valéry ni Oscar Wilde, dont les œuvres sont absentes du catalogue, pas plus que Stéphane Mallarmé ou Paul Claudel. L’élan du détachement fit dire à Gide dans le Temps du 17 avril 1925, quelques jours avant la vente :
“[ces] livres [… ] ne me font souvenir que d’une crise de bibliomanie, dont je suis fort heureusement guéri [… ] l’amour de la littérature n’a que très peu de chose à voir avec celui des livres. Dans l’édition à 1 fr. 20, où je la relis à présent, que j’emporte avec moi en promenade et couvre de coups de crayon, l’Éducation sentimentale ne me paraît pas moins admirable que dans cette première édition dont je me sépare et que je crois bien n’avoir jamais ouverte.”
F. Lestringant, André Gide l’inquiéteur. Le sel de la terre ou l’inquiétude assumée. 1919-1951, Paris, 2012, t. II, pp. 276-280
WEBOGRAPHIE : “Vente de la bibliothèque de M. André Gide”, e-Gide, 27 décembre 2008 : http://e-gide.blogspot.com/2008/12/vente-de-la-bibliothque-de-m-andr-gide.html