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Du Rôle civilisateur de la race noire
REMARQUABLE PLAIDOYER SCIENTIFIQUE ET HISTORIQUE EN FAVEUR DES HOMMES NOIRS.
LA MARQUE INDÉLÉBILE DE L’ESCLAVAGE AUX ÉTATS-UNIS.
MANQUE À LA MAJORITÉ DES GRANDES BIBLIOTHÈQUES AMÉRICAINES.
BEL EXEMPLAIRE AVEC ENVOI AU MÉDECIN-CHEF QUI CRÉA LE GRAND HÔPITAL GÉORGIEN DE TBILISSI
ÉDITION ORIGINALE
In-8 (210 x 129mm)
COLLATION : 95 pp.
ENVOI autographe signé :
À mon ami le Dr. Dartigues
en témoignage de mon admiration
Dr. Casséus,
Paris, le 26 avril 1911
RELIURE : cartonnage marbré, dos à la bradel
docteur Louis Dartigues (envoi)
En France, cinq exemplaires de ce livre sont conservés dans des institutions publiques dont un à la Bibliothèque nationale de France (cote 8-R-24487). Aucun n’est signalé comme portant un envoi. Seules trois bibliothèques américaines en conservent un exemplaire : la New York Public Library (Sc 572.893-C), University of Florida (cote HT1581.C38 1911), et Cornell University Library (cote HT1581.C34). Ce livre manque donc à la Library of Congress et à la majorité des grandes institutions américaines.
Auguste Casséus naquit à Haïti en 1871 et étudia la médecine en France. Il devint l’assistant du docteur Samuel Pozzi, pionnier de la gynécologie moderne. Pendant la Première Guerre mondiale, il dirigea la clinique du Pavillon Ledoyen, sur l'avenue des Champs-Élysées, fondée par l’écrivaine et philanthrope Jeanne Loiseau. Le docteur Casséus est décoré de la Légion d'honneur en 1920 pour avoir soigné et sauvé un très grand nombre de blessés de guerre.
Ce texte, Du rôle civilisateur de la race noire, reprend une conférence donnée par Auguste Casséus à l’École des Hautes Études Sociales le 23 février 1910. Il parut dans le numéro de la Revue Positiviste Internationale de mars 1911, avant d’être publié en volume la même année. L’éloquente profession de foi humaniste qui ouvre ce discours n’a pas perdu de sa résonance depuis le moment où elle fut prononcée, à la veille de la Première Guerre mondiale, jusqu’à notre époque :
“En ces temps de fâcheux esprit de parti, d’égoïsme et de secte, il est consolant de trouver un groupe d’hommes intelligents qui, dans leurs délibérations comme membres de ce groupe, ne considèrent ni le rang, ni la richesse, ni le parti politique, ni la croyance religieuse, ni la race, et qui subordonnent toutes les questions à la paix générale, au bien-être et à la prospérité commune de tous les peuples” (phrase liminaire, p. 7).
Le texte est parcouru de saillies brillantes par leur liberté de ton et leur clarté. Ainsi, les idées de sang et de race sont bien des vues de l’esprit “sentimentales” servant à façonner des clans et à servir des intérêts opposés :
“La loi de l’évolution de l’espère ne peut être scindée que par l’orgueil humain ; mais la nature n’obéit pas ainsi à des influences sentimentales” (p. 31).
Le discours d’Auguste Casséus commence par des considérations scientifiques pointues quant aux prétendues espèces et “races” humaines : “il y a des blancs aussi noirs que n’importe quel “nègre”… Le principe de la coloration de la peau est le même chez tous les hommes… c’est là une erreur qui donne lieu à des conflits sérieux” (pp. 18-19).
Auguste Casséus s’attache ensuite à démontrer l’apport de l’Afrique noire à la culture mondiale, battant en brèche certains préjugés dominants chez ses contemporains comme l’exclusion de l’Afrique de l’histoire universelle :
“À l’origine des sociétés humaines, le Noir sera le premier guide et le premier maître de l’humanité, le premier père des sciences et des arts, le fondateur de la brillante civilisation égyptienne” (p. 92).
Ses références vont des auteurs latins aux philosophes des Lumières, de la Révolution française au commerce d’esclaves du Nouveau Monde. Sont convoquées tour-à-tour les figures de Christophe Colomb, Cromwell, La Fayette, Washington (p. 81), Toussaint Louverture bien sûr et Abraham Lincoln (p. 84). Le roman de Harriet Beecher Stowe, La Case de l'oncle Tom est cité en référence (p. 69) comme les annonces “très suggestives” des journaux américains du XVIIIe siècle : “À vendre une bonne servante ayant encore trois ans et demi à faire. Très bonne fileuse” (p. 70).
À travers la question des esclaves noirs, est abordée celle de l’esclavage en général. On trouve ainsi “des milliers de chinois transportés partout où l’on pouvait les vendre” (p. 70), et des esclaves blancs exportés d’Europe aux États-Unis : “quant aux blancs, c’est l’Allemagne surtout qui a fourni la marchandise”. On peut ainsi lire l’annonce suivante : “En août 1766, le Messager de Pennsylvanie imprime : “à vendre une jeune servante allemande, robuste, fraîche et saine. On n’a pas de défauts à lui reprocher etc.” et plus loin : “nous offrons cinquante allemands qui viennent de débarquer… On trouvera parmi eux des jeunes filles pouvant faire toutes sortes de métier, et aussi… de jeunes garçons”.
La dernière partie du discours est entièrement consacrée aux États-Unis, et à la Guerre de Sécession (pp. 84 et suiv.) :
“On put croire un moment que les États du Nouveau Monde eussent devancé l’Europe dans l’œuvre de l’affranchissement général. Il n’en fut rien… Quelque fût le mobile de la guerre de Sécession, elle demeure l’événement capital de l’histoire politique des États-Unis, en même temps qu’elle honore les philanthropes et les hommes d’État du Nord”.
Auguste Casséus poursuit par une ultime injonction : “considérons rapidement quelles ont été les conséquences politiques et sociales de l’esclavage des Noirs aux États-Unis” ; et conclut son discours de 1910 avec un optimisme qui n’aura trouvé un début de résonance réelle qu’un siècle plus tard :
“Si c’est un simple commencement, il est d’un bon augure. Et l’avenir n’est peut-être pas loin qui prouvera que son rêve de reconquérir une place digne parmi les peuples les plus avancés n’est pas une chimère, et que son génie aura lui aussi sa part dans les grandes idées et les les œuvres contemporaines” (p. 95).
Kees Van Dongen a peint un magnifique portrait d’Auguste Casséus (1924), ambassadeur d’Haïti, qu’il offrit au Musée des Beaux-Arts Jules Chéret, à Nice, en 1959. Auguste Casséus y est représenté les pieds ridiculement petits et les doigts démesurément longs. Fixe, devant un étonnant voilier, vêtu d’un habit officiel chargé d’ors et de médailles, il témoigne d’une haute conscience de sa fonction.
L’exemplaire porte un envoi au chirurgien Louis Dartigues (1860-1940), qui fut également l’élève du docteur Samuel Pozzi. Le grand fait d’armes du docteur Louis Dartigues fut d’être nommé médecin-chef à Tiflis (aujourd’hui Tbilissi), capitale de la Géorgie, en 1917, et d’y organiser le service hospitalier. Un long récit pittoresque rend compte de cette mission :
“La Géorgie aspirait à l'autonomie, au milieu d'un nombre extraordinaire de groupes ethniques. Les autorités n'étaient plus obéies… L'armée russe, qui avait réalisé l'année précédente les exploits d'Erzeroum et de Trebizonde, abandonnait le front en vendant ses provisions et ses munitions à l'ennemi. Elle contournait pendant des jours la ville de Tiflis surpeuplée de réfugiés venant d'Asie Mineure… A partir de novembre, des bandes de soldats installèrent l'anarchie dans les rues… On ne respectait même pas les morts… La formation chirurgicale ne devait soigner que des blessés. Ce furent, en plus des blessés du front du Caucase, ceux des batailles de rues et des journées d'émeutes raciales, et les victimes d'agressions et d'accidents” (E. Gilbrin)
Numéro OCLC : 3189605 -- E. Gilbrin, Le Docteur Louis Dartigues. L'hôpital chirurgical français de Tiflis, août 1917-mai 1918, communication présentée à la séance du 26 novembre 1977 de la Société française d'histoire de la médecine : https://www.biusante.parisdescartes.fr/sfhm/hsm/HSMx1978x012x001/HSMx1978x012x001x0089.pdf