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MITTERRAND, François

Lettre autographe signée à Marie-Louise Terrasse, dite Catherine Langeais

14 June 2025

“NOUS AURONS TOUJOURS FAIM L’UN DE L’AUTRE, CAR NOUS NE POURRONS JAMAIS TUER NOTRE AMOUR AU FOND DU CŒUR”.

“QUE NOTRE AMOUR AIT CECI D’EXCEPTIONNEL, NE TRAÎNER AUCUN REMORDS”

LETTRE AUTOGRAPHE SIGNÉE

2 pp. in-8 (271 x 147 mm), encre noire et crayon, lettre à en-tête du “Kriegsgefangenenpost”, cachet du Stalag, cachet de la poste

CONTENU : 

[Suscription :] Mademoiselle Marie-Louise Terrasse, Paris, 5 avenue d’Orléans 5, XIVe arrt, Seine, France. [Expéditeur :] François Mitterrand, 21716

[Verso :] Le 3 août 41. Ma Marie Zou chérie, voici un long dimanche qui s’achève. Tu n’as guère quittée ma pensée. Dans ta lettre du 25 juillet reçue avant-hier, tu me dis ta peine, et en même temps ta tendresse pour moi, tes inquiétudes devant notre avenir. Tu vois que je continue de dire “notre” avenir, j’éprouve une force intérieure, implacable, qui me dit que tout ce qui nous lie déjà, (ces années d’amour, tristes ou joyeuses, ces souvenirs, ces gestes, et surtout cette connaissance que nous avons l’un de l’autre et qui fait de nous deux êtres désormais inséparables), n’est que le prélude d’une possession totale, et que seulement dans cette possession nous trouverons un violent bonheur. Je crois que rien n’empêchera cette fatalité (heureuse ? malheureuse ?) qui nous attire toujours l’un vers l’autre, jusqu’au jour où nous confondrons notre bonheur, notre plaisir inouï, nos désirs dans notre union parfaite. Mon amour chéri, je tremble souvent devant notre vie et pourtant je la préfère telle, même si elle nous réserve d’amères souffrances. Je sens qu’aucun être au monde ne me possédera jamais comme toi et je sais aussi qu’aucun être ne te donnera plus que moi ce que tu cherches, ce que tu désires. Et c’est pourquoi, ma bien-aimée, je prie désespérément car nous pouvons encore nous créer une vie radieuse. Qu’est-ce que le passé qui t’a éloignée de moi ? Rien, puisque nous pouvons faire à nous deux un foyer plein d’amour. Ce foyer que nous avons rêvé, tu sais bien, chérie, que, ni toi ni moi, nous ne pourrons le construire avec un ou une autre. Nous aurons toujours faim l’un de l’autre car nous ne pourrons jamais tuer notre amour au fond du cœur. Pense à tout ce qu’il y a d’incomparable, de précieux dans notre tendresse, cet amour de toute la vie avec les bonheurs quotidiens, les peines supportées ensemble, les enfants faits de nous-mêmes, qu’on voudrait meilleurs et plus beaux que nous. Pense à toute cela ma petite reine chérie. N’étais-tu pas orgueilleuse autrefois de ce que je t’apportais ? Je te donne tout ce que je suis. Ne crois pas ces paroles indifférentes à ce que tu souffres. Sois sûre, chérie, que je ressens ta peine, que je comprends tes désirs même contre moi, que personne ne te comprend plus profondément que moi. Est-ce trop exiger de ta loyauté envers moi ? Dis-moi ma très aimée, avant de jouer ta vie, notre vie, aie le grand courage d’attendre mon retour prochain. Cela sera sûrement très dur. Mais comprends-moi, que notre amour ait ceci d’exceptionnel : ne traîner avec soi aucun remords. Pas au nom de la loyauté, ma fiancée chérie, mais de tout ce qui nous a donné le bonheur que tu sais. J’ai en moi le visage de ma merveilleuse petite fille du 3 mars.

François