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MITTERRAND, François

Lettre autographe signée à Marie-Louise Terrasse, dite Catherine Langeais

13 May 2025

DERNIÈRE LETTRE CONNUE DE FRANÇOIS MITTERRAND À MARIE-LOUISE TERRASSE, ÉCRITE DEPUIS UN NOUVEAU STALAG EN MOSELLE, JUSTE AVANT SA TROISIÈME ET ULTIME ÉVASION, CELLE QUI RÉUSSIRA.

ANNONCE DE L’ÉCHEC DE LA DEUXIÈME ÉVASION : “TU SAIS DONC MAINTENANT QUE FATOUNE A ÉCHOUÉ À SON DEUXIÈME EXAMEN DE SORTIE DU CONSERVATOIRE ET DE NOUVEAU, À LA DERNIÈRE ÉPREUVE”.

LA PREMIÈRE SEMAINE DE DÉCEMBRE MARQUE LA DÉFAITE DES ALLEMANDS DEVANT MOSCOU

LETTRE AUTOGRAPHE SIGNÉE

2 pp. in-8 (277 x 147 mm), encre bleue et crayon, lettre à en-tête du “Kriegsgefangenenpost”, cachet du Stalag


CONTENU : 

[Suscription :] Zone occupée, Mademoiselle Marie-Louise Terrasse, Paris, 5 avenue d’Orléans 5, XIV arrt, Seine, France. [Expéditeur :] François Mitterrand, 21716 St. IX. A

[Verso :] Le 3 déc 41. Ma Marie-Louise chérie, tu vois que j’ai changé momentanément d’adresse. Je suis en effet depuis deux jours à Boulay. Mais je ne dois pas rester dans ce camp de Lorraine et dois regagner incessamment mon stalag IX A. Tu me répondras donc, si tu le désires, à mon adresse ordinaire. Tu sais donc maintenant que Fatoune a échoué à son deuxième examen de sortie du Conservatoire et de nouveau, à la dernière épreuve. Dis-lui mon ennui. Je n’ai pas de nouvelles de toi depuis très longtemps. Je pense à toi, car je t’aime, tu le sais. Je voudrais que tu cesses de souffrir, mais dois-je payer de ma souffrance ton bonheur ? Je te l’offre s’il le faut. Ce qui m’attriste devant ton silence, c’est de songer que tu t’éloignes de moi par l’esprit. Non pas que je puisse me contenter du simple don de ton amitié fidèle, mais je chérissais tant cette confiance qui nous unissait, qui faisait de nous deux êtres si proches, que de te voir aujourd’hui si lointaine me bouleverse, alors que je croyais que je ne pouvais plus désormais souffrir par toi. Ma douce-amère chérie, bientôt deux ans que nous nous sommes quittés. Quand nous nous reverrons, que serons-nous ? Je suis si différent d’autrefois, homme d’aventure et d’inconnu. Alors pourquoi suis-je ainsi attaché à toi depuis ma jeunesse ? J’aimais toute chose et j’aurais pu disperser cet amour. Quel plaisir aurais-je refusé ? Mais Dieu a sans doute voulu que de ce besoin de dispersion, je fasse un ordre. Et de toutes les femmes que j’aurais pu aimer et caresser, de tous les plaisirs que j’aurais pu goûter, de toutes les ambitions que j’aurais pu rechercher, je m’effraie (je m’émerveillais) à la pensée que toi seule, ma merveilleuse, toi seule femme as tout accepté, et lié. Mon Zou chéri, je pense à notre amour, à notre vie. Mais tu as trop de moi-même. Je t’embrasse.

François