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Estimation d'un livre ou d'un manuscrit
BRÉVIAIRE, partie été (à l’usage d’un couvent dans le Bugey, peut-être un lien la Chartreuse des Portes (dept. Ain) ou la Chartreuse de Seillon (dept. Ain) ?)
RARE ET BEL EXEMPLE D’UN BRÉVIAIRE MONASTIQUE DU XIIIE SIÈCLE, PARTIE ÉTÉ, AVEC LE CALENDRIER RELIÉ EN FIN DE VOLUME
Dimensions de la reliure : 232 x 148 mm ; dimensions des feuillets : 222 x 140 mm.
COLLATION : 172 ff., précédés et suivis d’un feuillet de garde de parchemin (remploi, traces d’écriture ancienne), manque 2 feuillets [collation : i-x8, xi7 (8-1, manque ii entre ff. 81-82), xii8 (avec ff. 89-94 rognés courts avec marges découpées), xiii-xviii8, xix7 (8-1, manque viii entre ff. 149-150), xx-xxi8, xxii4, xxiii2], écriture gothique liturgique, texte copié sur une seule colonne, 29 lignes par page (justification : 145 x 90 mm), signatures anciennes en chiffres romains (au verso de chaque dernier feuillet de cahier, certains rognés courts), rubriques en rouge, petites majuscules en rouge dans le corps du texte, initiales de couleur rouge ou bleu avec décor filigrané bleu ou rouge (2 à 6 lignes de hauteur), initiale peinte en rouge avec prolongement orné à l’encre rouge et brune (grand oiseau dans la marge inférieure, fol. 169), une grande initiale S ornée (décor zoomorphe, fol. 1) et 4 initiales ornées (jusque 5 lignes de hauteur, or liquide et décor beige ou bleu, décor à palmette avec rehauts blancs), nombreuses annotations, corrections ou ajouts (mains contemporaines) dans les marges.
CONTENU : ff. 1-93, Bréviaire, partie été, Temporal, de la Vigile de la fête de l’Ascension (Mercredi des rogations, vêpres), Vigile de la Pentecôte, Dimanche de Pentecôte, Octave de la Pentecôte, suivi du temps ordinaire après l’octave de la Pentecôte (25 dimanches).
On notera 12 lectures (leçons) pour chaque fête et dimanche. La majorité des lectures sont extraites des textes patristiques (homélies) et des évangiles. Il devait exister une partie hiver pour ce bréviaire, copié dans un volume à part, sans doute associé à un Psautier liturgique.
ff. 93-148v, Bréviaire, partie été, Sanctoral, de la Nativité de saint Jean-Baptiste à saint Saturnin ; rajouts dans la marge : In octavo sancto johannis baptiste ad vesperas… (fol. 104v) ; […] sanctorum martyrum tuorum Mauritii, Exsuperii, Candidi, Victoris, Innocentii et Vitalis (fol. 132) ; In festo reliquiarum (fol. 145).
ff. 148v-169, Bréviaire, partie été, Commun des saints.
ff. 169v-172v, Calendrier, pour les mois de mai à novembre, en latin ; signalons les saints et entrées suivants : Hugo archiepiscopus (7 mai) : il doit s’agit d’Hugo, archevêque de Vienne, mort à la Chartreuse des Portes le 6 (ou 7 ?) mai 1155 ; Johannes prior Seillonis [Jean prieur de Notre-Dame de Seillon, chartreuse sise à Peronnas (Ain)] (9 mai) ; Alexander papa, (rajouté par une main proche contemporaine, 25 mai) : il peut s’agir d’Alexandre IV, pape, mort le 25 mai 1261 ? ; Imperator Fredericus [Frédéric Ier de Hohenstaufen (1155-1190, mort le 10 juin 1190)] (11 juin) ; Sofredus episcopus (22 juin) : peut-être Soffredus, évêque de Grenoble (1223-1237) ? ; Lanthelme ou Anthelme, évêque de Belley (26 juin, mort en 1178) [Bellicensis : Bellay est la capitale historique de la province du Bugey ; Pagus Bellicensis : à la fin du Xe siècle, la ville fait partie des territoires du Saint-Empire romain germanique ; à partir du XIe siècle, elle passe sous la dépendance des comtes de Savoie]. Il doit s’agit d’Antelme de Chignin, évêque de Belley de 1163 à 1178, choisi après sa mort comme saint patron de la ville de Belley, il s’oppose au comte de Savoie Humbert III ; Amblardus martyrus et sanctus (1 juillet) ; Bonifacius archepiscopus (19 juillet) : Boniface de Savoie, fils du comte Thomas Ier de Savoie et Marguerite-Béatrice de Genève, évêque de Belley puis archevêque de Cantorbéry, mort le 18 juillet 1270 ; il commence sa carrière ecclésiastique auprès de l’ordre chartreux puis sera nommé prieur de Nantua ; Officium marnacensium (26 août) : il s’agit du prieuré de Marnans (dept. Isère), d’abord fondation de chanoines de l'Ordre de Saint Augustin puis fondation confiée aux Hospitaliers de Saint Antoine (1288); Alexander dominus Bauchiaci (31 août) ; Bruno magister (6 octobre) : fondateur de la Grande Chartreuse en 1084, mort à la chartreuse de Calabre le 6 octobre 1101 ; Guigo episcopus (12 octobre) ; Cluniacensis bonus homo martyrus et sanctus (18 octobre) ; Officium calesiensium (14 novembre) : il s’agit de l’Office de Notre-Dame de Chalais (près de Voreppe, Isère), couvent fondé en 1108 par Hugues, évêque de Grenoble (1053-1132 ; canonisé en 1134, fête le 1er avril), d’abord placé sous la règle de saint Benoît, sous le patronage de Guigues III, puis ses fils Guigues et Humbert ; en 1303, Guillaume IV, évêque de Grenoble donna l’abbaye de Chalais aux Chartreux et l’abbaye fut administrée par un prieur et le lieu fut dit « Prieuré de Chalais » [voir Pilot, Notice sur l’ancien couvent de Chalais, Extrait du Bulletin de la Société de statistique du département de l’Isère, 20 avril 1844]. En fin de calendrier, à la fin du mois de novembre, on a copié l’alphabet pour signaler la fin de cette partie du codex.
RELIURE : ais de bois, couture apparente au dos, dos cousu sur 5 nerfs (premier et cinquième nerfs accidentés), pas de couverture de cuir ou de parchemin, reliure contemporaine du manuscrit.
PROVENANCE :
1. Manuscrit copié et décoré dans le sud-est de la France, sans doute dans un contexte cartusien, datable du XIIIe siècle. Une étude plus poussée des lectures retenues, de la liturgie permettra certainement de mieux statuer le milieu monastique dans lequel ce manuscrit fut réalisé.
2. On notera au calendrier le très grand nombre d’entrées et commémorations réservées à des « prieurs » (par exemple « Guigo prior » (29 juillet) ou « Priori Enricus » (17 septembre)), signe que l’on honore la mémoire des défunts prieurs d’un prieuré dans lequel ce manuscrit a servi liturgiquement. Chez les Cartusiens il n’y a pas d’abbés mais des « prieurs » responsables de l’Ordre. Dans le présent manuscrit, le calendrier est presque dépourvu des fêtes traditionnelles et sert finalement plus comme nécrologe ou obituaire.
Au calendrier, plusieurs noms masculins sont suivis du symbole « 9 tironien » pour le « quondam » (décédé), par exemple : « Durandus 9 [quondam] » (15 novembre) ; « Petrus 9 [quondam] » (27 novembre) et passim. Il ne s’agit pas de fêtes de martyrs ou saints mais plutôt a priori de jours de décès de membres de la communauté religieuse.
Une entrée au calendrier (9 novembre) indique : « Commemoratio nostrorum defunctorum », comme dans plusieurs manuscrits d’origine cartusienne (Commemoration de nos défunts, indiquant que l’on est dans un contexte monastique). On soulignera que saint Bruno, fondateur de la Grande Chartreuse, est honoré le 6 novembre au calendrier (Bruno Magister). Ces deux entrées au calendrier suggèrent fortement un lien cartusien.
3. France, collection privée.
Le calendrier est des plus intéressants, car il retient certaines fêtes liturgiques, mais fait surtout la part belle aux décès de prieurs, de personnalités honorées dans une fondation (cartusienne ?) ou en tout cas avec des liens avec des fondations sises dans le Bugey (Ain, Notre-Dame de Seillon ; Notre-Dame des Portes) et dans l’Isère (Marnans, Chalais). Les lectures (12 leçons comme le veut la liturgie cartusienne) sont presque toutes issues de textes patristiques (proches de celles que l’on trouverait dans un homéliaire) et issus des évangiles.
Depéry, Jean-Irénée, Histoire hagiologique de Belley ou recueil des vies des saints et des bienheureux nés dans ce diocèse, 1834 -- Dubois, J. « L’implantation monastique dans le Bugey au Moyen Age », in Journal des savants, janvier-mars 1971, pp. 15-31 -- Etaix, R. « L'homiliaire cartusien », in Sacris erudiri XIII, 1962, pp. 67-112.