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Estimation d'un livre ou d'un manuscrit
Madeleine Férat
REMARQUABLE EXEMPLAIRE AVEC ENVOI D’ÉMILE ZOLA À ALBERT LACROIX, ÉDITEUR DU ROMAN
ÉDITION ORIGINALE
In-12 (181 x 112mm)
TIRAGE : il n’existe pas de grand papier
ENVOI autographe signé :
À Monsieur Lacroix, hommage sympathique
PIÈCES JOINTES :
1. L.a.s. du 8 décembre 1868, 1 p. in-8, adressée à Odysse Barot : “je vous remercie mille fois de l’obligeance que vous avez mise à vous occuper de mon débat avec l’éditeur Lacroix. Je vous en remercie d’autant plus vivement que la publicité donnée à l’incroyable attitude du parquet à mon égard, vient de décider mon éditeur à mettre Madeleine Férat en vente. Le volume était prêt, un procès aurait nui à tous nos intérêts. Je pense que le parquet réfléchira avant de me poursuivre, maintenant que la presse s’est prononcée. Permettez-moi de vous offrir un exemplaire de ce livre à la publication duquel vous avez puissamment aidé. J’en adresse également un à M. Georges Bell, désirant que la Liberté, après avoir parlé du veto censorial, dise que mon éditeur a eu le courage de passer outre”… Référence : Correspondance, II, lettre n° 56
2. L.a.s. du 20 janvier 1869, 1 p. in-8. Destinataire inconnu : “j’avais prié mon éditeur, M. Lacroix, de vous remettre en mon nom un exemplaire de mon dernier roman : Madeleine Férat. J’apprends qu’il a négligé de le faire, et je m’empresse de réparer son oubli. Un auteur ne peut se juger lui-même, et si je me permets de vous adresser mon œuvre, c’est que j’ai grand besoin de savoir ce qu’en pense la critique. Je tiens à l’opinion des plumes livres”… Lettre inédite
3. L.a.s. du 7 décembre 1868, 1 p. in-8. Destinataire inconnu : “voici le livre terrible qui a failli ne pas être mise en vente. La publicité donnée à l’incroyable attitude du parquet à mon égard, vient de décider Lacroix à passer outre. Je pense que le Procureur impérial réfléchira avant de me poursuivre, maintenant que la presse s’est prononcée. Si vous avez la curiosité de connaître les passages incriminés, ces passages commencent aux pages 181, 255, 288. Dites ce que vous pensez aux lecteurs de la Tribune, et ne songez pas que je suis votre collaborateur et votre ami”… , petites traces de rousseurs dans les plis, bande adhésive au verso en renfort du pli. Provenance : librairie Vidal-Mégret, 1935, n° 249. Référence : destinataire non identifié dans la Correspondance (II, n° 55)
RELIURE SIGNÉE DE SEMET ET PLUMELLE. Maroquin parme janséniste doublure de maroquin brun avec encadrement d’un filet doré, gardes de soie moirée rouge, dos à nerfs, tranches dorées, couverture bleue et dos d’origine conservés. Étui
L’éditeur Albert Lacroix, craignant de publier tel quel Madeleine Férat à cause de la censure, songea à en supprimer certains passages. La réaction de Zola fut immédiate. Le 14 novembre 1868, il écrivit à Lacroix : “Je reçois votre lettre qui me surprend beaucoup. Je connais votre position devant la justice française, et j’aurais été le premier à vous avertir, si j’avais pensé que la publication de mon livre pût présenter quelque danger pour vous. Raisonnons, je vous prie. Madeleine Férat a déjà été publiée dans L’Événement sous le titre La Honte. Il est impossible qu’on inquiète cette oeuvre mise en volume… C’est là bel et bien de la censure préventive, et, au lieu de me demander des suppressions, vous devriez m’aider à dire son fait au Parquet”. Les journaux se saisirent de l’affaire. Lacroix confiera bien plus tard que cette histoire d’“affaire Madeleine Férat” était un coup monté par Zola pour faire de la publicité au livre. Si Zola a probablement grossi l’affaire, il ne faut pas toutefois penser que le danger n’était pas réel.
La première lettre jointe à cet exemplaire est certainement adressée à François-Odysse Barot (1830-1907), journaliste à La Liberté. Il défendit le roman de Zola en première page de son journal, en prévision des coupes possibles voulues par Lacroix. L’article de Barot s’intitulait “La censure préventive” :
“À quoi bon voter des lois libérales si l’on nous retire en réalité dans la pratique ce qui nous a été concédé en théorie ?… cette affaire prouve une fois de plus que la liberté de la presse n’est rien, si elle n’a pas pour complément la liberté de l’imprimerie et de la librairie. On n’a pas supprimé les fonctions de censeur, on les a confiées tout simplement aux imprimeurs et aux libraires”.
M. Clouzot, Guide du bibliophile français, p. 279, qui signale la différence de datation entre la couverture et le titre -- Émile Zola. Correspondance, sous la direction de B. H. Bakker, Montréal et Paris, 1978, tome II