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Lettres persanes
L’ÉDITION ORIGINALE DES LETTRES PERSANES RELIÉ EN VÉLIN DE L’ÉPOQUE.
“UNE DES MUTATIONS LES PLUS SIGNIFICATIVES DE LA PENSÉE OCCIDENTALE” SELON PAUL VALÉRY.
BEL EXEMPLAIRE DE L’ÉDITION “A”, CELUI DE HECTOR DE BACKER, CITÉ PAR TCHEMERZINE.
LA LETTRE LXXV PRÉSENTE LE CÉLÈBRE JUGEMENT DE MONTESQUIEU SUR DON QUICHOTTE : “LE SEUL DE LEUR LIVRE QUI SOIT BON, EST CELUI QUI A FAIT VOIR LE RIDICULE DE TOUS LES AUTRES” (T. II, P. 22)
ÉDITION ORIGINALE, appelée édition “A”, de mai 1721, sans les cartons ni au tome 1 ni au tome 2. Aucun manuscrit n’est connu
2 tomes reliés en un volume in-12 (131 x 80 mm.). Titres imprimés en rouge et noir, celui du premier volume avec un fleuron à rinceaux, celui du second avec des angelots
ÉTAT : l’édition A comporte cent cinquante lettres, l’édition B en comporte treize de moins
COLLATION : (vol. 1) : titre, 311 pp., soit : π1 A-N12 ; (vol. 2) : titre, 347 pp., soit : π1 A-O12 P6
RELIURE HOLLANDAISE DE L’ÉPOQUE. Vélin ivoire rigide, nerfs apparents, titre au dos
PROVENANCE : cote “123” manuscrite d’époque, à l’encre brune, en queue de dos -- Hector de Backer (1843-1925 ; sa vente : Paris, 1926, n° 1121, 6020 francs) -- Pierre Berès
Charles-Louis de Secondat de la Brède, baron de Montesquieu (1689-1755) publie de façon anonyme ses Lettres persanes en mai 1721. Les critiques sévères formulées par l’auteur envers le pouvoir royal l’avait conduit à imprimer son œuvre clandestinement en Hollande : "pour être sûr que le secret fût bien gardé et que l'impression fût bien faite, Montesquieu confia son manuscrit à son secrétaire qu'il envoya à Amsterdam. Celui-ci y séjourna jusqu'à la fin de sa mission, qu'il couronna en mettant sur la première page du livre un nom de libraire supposé et un lieu d'impression inexact" (L. Vian, Histoire de Montesquieu). Cet imprimeur supposé n’était autre que Susanne de Caux, elle-même veuve d’un autre imprimeur, Jacques Desbordes (1667-1718). Bien que l’auteur ait été absent d’Amsterdam, l’édition “A” de Pierre Marteau, celle de mai 1721, est la seule édition entièrement décidée, avouée et contrôlée par Montesquieu : “De toutes les éditions de ce livre, il n’y a que la première qui soit bonne (…) Elle parut vers 1721, imprimée à Cologne, chez Pierre Marteau” (Montesquieu, Mes Pensées, n° 2003, cité par P. Stewart).
La stratégie éditoriale adoptée par l’auteur pour ses Lettres persanes préfigure celle de L’Esprit des Lois : publier le livre dans un pays étranger avant de le présenter à la censure en France. Montesquieu accepte alors d’y apporter quelques changements pour que la diffusion soit plus ou moins permise officiellement dans le reste du pays. Les Lettres persanes ont ainsi été présentées à la Direction de la Librairie qui ne l’interdit pas. L’auteur vient à Paris en 1722 pour jouir de son triomphe. Il est reçu chez le Régent, même s’il n’avoua jamais avoir écrit cette fiction par lettres. Le succès du livre fut tel que, la même année, en parurent sept autres éditions.
Ce roman épistolaire parsemé d’allusions à la vie de l’auteur met en scène deux orientaux en voyage en Occident. L’ouvrage ouvre une critique cinglante envers l’absolutisme. Les deux protagonistes du roman émettent, avec l’auteur lui-même, des solutions de compromis “conduisant à un accord entre la terre et l’argent, le sang et le mérite” (En Français dans le texte). Les dernières lettres achèvent l’autopsie sociale de la France par une satire mordante du Système de Law et expriment déjà la méfiance de Montesquieu envers une finance sans contrôle. Le libéralisme ne signifie pas pour Montesquieu une liberté sans frontière, mais avant tout, une condamnation du despotisme de Louis XIV.
Quant à la formule célèbre de Montesquieu sur Cervantes et Don Quichotte dans la lettre LXXV (ou LXXVIII selon les numérotations) - “le seul de leur livre qui soit bon est celui qui fait voir le ridicule de tous les autres” -, elle donna lieu à une contradiction écrite de José Cadalso, composée vers 1770, et titrée : Défense de la nation espagnole contre la Lettre persane 78 de Montesquieu.
A. Tchemerzine, Bibliographie des éditions originales et rares d'auteurs français, IV, a) p. 920 -- L. Vian, Histoire de Montesquieu, p. 56-57 -- En Français dans le texte, 138 -- voir aussi Edgar Mass, Le développement textuel et les lectures contemporaines des « Lettres persanes”, Cahiers de l’AIEF, p. 192 et Philip Stewart, Les Lettres persanes en leur temps, 2013, UMR 5317 du CNRS -- P. Barrère, “Montesquieu et l’Espagne”, Bulletin hispanique, 1947, n° 3-4, pp. 299-310
WEBOGRAPHIE : Dictionnaire Montesquieu, art. de Philip Stewart, “Lettres persanes”, http://dictionnaire-montesquieu.ens-lyon.fr/fr/article/1377778509/fr/