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Lettre autographe signée à Charles Baudelaire
TRINQUER AVEC BAUDELAIRE
2 pages in-8 (208 x 129mm), à l’encre brune, cachet de la poste
“Mon cher ami,
Je me charge auprès de vous d’une supplique très difficile à rédiger, - et au succès de laquelle on tient énormément ! Pourquoi l’on m’en a chargé ? Les gens aimables diront qu’ils comptent sur mon style. Moi j’affirmerai que c’est pour pouvoir m’imputer l’échec en cas d’échec ! Calculez donc le cas où vous m’induisez.
Demain samedi Léontine pend la crémaillère dans son nouvel appartement (boulevard du Temple 28). Les amis dînent et festinent à 6 heures. Les moins liés viennent le soir. On veut que vous soyez des plus liés, et que vous veniez vous mettre à table à côté d’amis et de gens utiles dans l’occasion. Ne refusez pas ! On vous demande comme [que] vous soyez à l’heure que vous voudrez, pour le temps qui vous sera loisible ! Mais on vous demande et on vous exige, fut-ce une heure ! Venez donc à six heures demain, et je n’ai pas besoin de vous dire que personne autant que moi n’aura plaisir à trinquer avec vous ! Philoxène Boyer”
Philoxène Boyer (1829-1867) rencontra Charles Baudelaire durant ses études à la Sorbonne. Il brûla sa vie par les deux bouts : obligé de parler en grec ancien à table, par son père, il avait lu, à dix-neuf ans, les trente mille volumes de la bibliothèque familiale. À vingt-trois ans, en seulement deux années, il avait dilapidé l’héritage de sa mère par de fabuleux banquets dans son superbe appartement. À vingt-six ans, il porte des vêtements élimés, a les cheveux déjà blancs, commence à s’enfoncer dans une misère de plus en plus grande. Il connaît ce que Paris a de plus intelligent, écrivant des articles à quatre mains avec Banville pour survivre ou donnant des conférences devant le Parnasse. Philoxène Boyer fut une des dernières personnes à voir Gérard de Nerval avant son suicide. Il proposa son toit à Victor Hugo, lors du coup d'État de Louis-Napoléon Bonaparte. Il mourut en novembre 1867, à l'âge de trente-huit ans, quelques mois seulement après Baudelaire.