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MALLARMÉ, Stéphane

[Lettre autographe signée à Léopold Dauphin]

Valvins, vendredi [25 septembre 1896]

AU SUJET DE LA FUTURE ÉDITION DES RAISINS BLEUS ET GRIS ET DE L’“AVANT-DIRE” QUE MALLARMÉ COMPTE RÉDIGER

2 pp. in-16 (114 x 89 mm), encre brune, papier cartonné bis à angles arrondis

“Cher ami,

Je suis en retard, hein ! les heures que je ne donnais pas au travail ont été prises par une correction forcenée d’épreuves, pour un bouquin1 en vue… – Oui, nous causerons, à Paris, de votre livre2, cet automne, j’entrevois une combinaison ; il ne faut pas songer à placer un livre de vers chez un éditeur, un premier livre, veux-je dire : mais on pourrait s’en faire l’avance et payer par la vente peu-à-peu. Au besoin et quoique le moins de prose possible convienne à un volume de poésie, je vous écrirais un billet de quelques lignes, après communication des épreuves ; qui pourrait se mettre en tête3. Même avant, nous ferions un bouquet, pour une revue. Tout cela vaut qu’on en cause mieux qu’ici. Toutes vos corrections à l’envoi sont excellentes et dans le vrai ton – car, vous y êtes, Dauphin, nom qu’il faudra écrire tout au long, vu qu’il n’y a plus, maintenant, de Pimpinelli4. Après Fumées, exquises, Et c’est l’automne est d’un beau rythme sûr et maître de son pas. Le Sonnet, d’une grave ferveur, me prend comme un cri seul et ample. Vous m’avez répondu de bonnes choses, après l’envoi de la Variation5 et comprenez si bien : les musiciens, décidément, sont des lecteurs car je reçois, au même propos, un mot parfait de Vincent d’Indy qui a bien voulu retrouver, parmi quelques phrases, là, les lois, dit-il, de la composition musicale. Si je suis vengé ! Au revoir, les baisers pleuvent, autour de moi ; et ma main dans toutes les vôtres. J’attends l’hiver et vos présences.

Toujours,

Stéphane Mallarmé

L’autre Sonnet, qu’oubliai-je ! mesure, par traits, sa tendresse, délicieusement : Depuis ce jour de fête…6”

1. Divagations, qui paraîtra chez Charpentier-Fasquelle en janvier 1897
2. Raisins bleus et gris, qui paraîtra à compte d’auteur chez Vanier au printemps 1897
3. Ce texte deviendra l’“Avant-dire”
4. Léopold Dauphin signait ses poèmes dans la revue du Chat noir du pseudonyme de “Pimpinelli”
5. Publiée dans La Revue Blanche
6. Sonnet non repris dans Raisins bleus et gris

BIBLIOGRAPHIE : 

C. P. Barbier, Documents Stéphane Mallarmé. IV, Paris, 1973, pp. 100-104, 209, n° LXXII -- S. Mallarmé, Correspondance, t. VIII, Paris, 1983, éd. H. Mondor et L. J. Austin, pp. 230-231, n° MMCLXXXIII