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MALLARMÉ, Stéphane

Oxford, Cambridge - La Musique et les lettres

Paris, Librairie académique Didier, 1895

UN DES RARES EXEMPLAIRES DE TÊTE SUR HOLLANDE, LE NUMÉRO 1.

EXEMPLAIRE D’AUGUSTE LAMBIOTTE.

BELLE RELIURE DE L'ÉPOQUE SIGNÉE DE CLAESSENS.

CÉLÈBRES CONFÉRENCES DE MALLARMÉ EXPLIQUANT LA "CRISE IDÉALE", OU CRISE DU VERS, TOUCHANT TOUTE POÉSIE FRANÇAISE À VENIR : "ON A TOUCHÉ AU VERS"

ÉDITION ORIGINALE

In-12 (186 x 122 mm).
TIRAGE : un des dix exemplaires de tête sur hollande, celui-ci numéroté 1, seul grand papier
RELIURE DE L'ÉPOQUE SIGNÉE DE CLAESSENS fils. Maroquin bleu, roulette dorée et filets en encadrement, dos à nerfs orné, tranche supérieure dorée, couverture conservée. Sans le premier feuillet blanc. Chemise
PROVENANCE : Auguste Lambiotte (Paris, 1977, III, n° 63)

La Musique et les lettres (1895) annonce la "crise de vers" de Divagations (1897). Elle s'appelle encore "crise idéale" (dans les deux sens du terme) : "l’acte d’écrire se scruta jusqu’en l’origine. Très avant, au moins, quant à un point, je le formule : - à savoir s’il y a lieu d’écrire" (p. 37). Cette crise de vers, qui traverse toute son oeuvre depuis les premières tentatives d’Hérodiade, annonce le vers libre du Coup de dés : "une heureuse trouvaille avec quoi paraît à peu près close la recherche d’hier, aura été le vers libre, modulation (dis-je, souvent) individuelle, parce que toute âme est un nœud rythmique… Quelques initiateurs, il le fallait, sont partis loin" (p. 35). Le but recherché avec Mallarmé, est de suggérer, et non plus de voiler, par la description, "les monuments, la mer, la face humaine, dans leur plénitude, natifs" (ibid.).

La suggestion sera un double travail de versification (engageant le rythme) et de sonorité : la musicalité. La suggestion est évoquée par la musique des mots ; ce pour quoi Mallarmé admira tellement Verlaine. Mallarmé invente au passage des formules :"Tout se résume dans l’Esthétique et l’Economie politique", évoquant d'éventuelles répercutions d’une telle révolution poétique, du sens et de l'Idée, sur la société. A la fin de sa conférence, Mallarmé évoque, en conséquence de cette nouvelle poésie, la disparition de la figure du poète problématique dès l'époque du Guignon : "un lamentable seigneur exilant son spectre de ruines lentes à l’ensevelir" (p. 57).

Si Oxford, Cambridge - La Musique et les lettres paraît à la fin de l'année 1894 (à la date de 1895), l'idée d'un tel texte expliquant les enjeux de la poésie moderne est née trois ans auparavant, avec la publication d'un premier article intitulé "Vers et musique en France" dans le Nouvel Observateur du 26 mars 1892. Des professeurs d’Oxford eurent alors l'idée de faire donner un cycle de conférences par le poète français, dans chacune des deux grandes universités anglaises : "J'espère que le temps sera beau. Oxford est superbe lorsque le soleil brille" (lettre de York Powell à Mallarmé, Christchurch, le 23 février 1894). Même si ces conférences furent prononcées alternativement en anglais et en français, on peut imaginer la difficulté que durent avoir les étudiants d'Oxford et de Cambridge pour bien comprendre les propos du poète français – tant la syntaxe de ses textes en prose est compliquée. Dès son retour, Mallarmé publia ses conférences en revue dans La Revue blanche et Le Figaro, puis en volume, précédées d’une relation sur son voyage en Angleterre, "Déplacements avantageux".

Les deux manuscrits connus de ces conférences sont conservés au fonds Jacques Doucet.

BIBLIOGRAPHIE : 

Œuvres complètes ? II, éd. par Bertrand Marchal, Paris, 1998, pp. 1597 et suiv. -- Clouzot, Guide du bibliophile français, p. 195 -- Fléty, Dictionnaire des relieurs français, p. 45