Publii Virgilii maronis opera

Le choix que fit Sebastian Brant (1458-1521) en la personne de Johannes Grüninger (1455-1532) pour assurer l’impression de son édition de Virgile apparaît assez logique après leur première collaboration lors de l’édition de la Nef des fous de 1494.

Les illustrations du Publii Virgilii maronis opera renseignent la façon dont les paysans alsaciens travaillaient et labouraient leurs champs. Les gravures reflètent aussi les grandes agitations paysannes en pays germaniques, avec les conjurations du Bundschuh. C’est ici que l’on trouve la première représentation de la bannière du Bundschuh avec le soulier à lacets au verso du feuillet 329 (chiffré par erreur 319). L’un des derniers avatars de cette jacquerie coïncidera avec le placardage des 95 thèses par Martin Luther sur la porte de la chapelle du château de Württemberg en 1517. La singularité de l’illustration de ce texte apparaît dans le style employé, à la fois anachronique et moderne aux yeux du lectorat de son temps. Le monde des dieux et héros de l’Antiquité et les scènes anciennes sont transposés à l’époque de la publication de l’ouvrage avec des costumes, bateaux, armes, monuments et villes contemporains. Brant défend son choix, expliquant qu’il souhaite offrir aux lecteurs des images auxquelles ils puissent s’identifier, utilisant des thèmes, motifs et symboles familiers. Le lecteur peut alors les comprendre sans difficultés et les retenir. Ainsi dans cette mise en abîme, les héros de l’Énéide deviennent des chevaliers contemporains.
Les illustrations de ce livre, comme le “Térence de Grünninger” qu’Alain Moatti ne put retrouver servirent de modèles à plusieurs générations d’artistes.