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Estimation d'un livre ou d'un manuscrit
Elemens de l'architecture navale ou traité pratique de la construction des vaisseaux
EXEMPLAIRE RELIÉ POUR PAUL IER, TSAR DE RUSSIE, PROVENANT DE SA BIBLIOTHÈQUE À TSARSKOÏE-SELO.
L’UN DES PLUS IMPORTANTS OUVRAGES D’ARCHITECTURE NAVALE
ÉDITION ORIGINALE
In-4 (245 x 185mm. Fleuron sur la page de titre, initiales et cul-de-lampe gravés sur bois, nombreux diagrammes et tableaux dans le texte,
COLLATION : π1 χ2 a-g4 A-Q4 R2 a-g2 S-Z42A-Z 3A-G4
ILLUSTRATION : frontispice gravé par Chedeau d’après le dessin de Nicolas Ozanne et 24 grandes planches dépliantes gravées sur cuivre sur 23 feuilles (les planches 8 et 9 étant gravées sur la même feuille), 9 grands bandeaux imprimés au-dessus de la dédicace à l’Académie de marine et au début de chaque chapitre dessinés et gravés par Nicolas Ozanne représentant de belles scènes navales
RELIURE RUSSE VERS 1790. Maroquin rouge, décor doré, chiffre “P” au centre des plats dans une mandorle, roulette d’encadrement, dos à nerfs ornés et dorés, tranches dorées
PROVENANCE : Paul Ier, tsar de Russie
Henri-Louis Duhamel du Monceau (1700-1782) est l’une des figures attachantes du XVIIIe siècle français. Il appartient à l’une des familles les plus importantes du jansénisme qui compte parmi ses membres d’importantes figures de prêtres de Port-Royal comme Henri Duhamel (1612-1682) ou Jean-Baptiste Duhamel (1624-1706). Son père, Alexandre Duhamel de Denainvilliers (1647-1714), fut élève aux Petites Écoles de Port-Royal. Sa grande-tante, Élisabeth Boulard de Denainvilliers, sera la dernière abbesse de Port-Royal (1699-1706). Les Duhamel étaient des familiers des ducs de Roannez - eux-mêmes proches de Blaise Pascal. Alexandre Duhamel de Denainvilliers, père de Duhamel de Monceau, participa avec les Roannez au projet de navigabilité de la Seine de Nogent à Troyes (1676). Sciences et techniques, dans l’esprit des inventions de Blaise Pascal, font dès l’origine bon ménage chez les Duhamel.
Duhamel de Monceau est l’auteur de livres remarquables sur les sujets les plus divers. Leur haute qualité scientifique s’accompagne d’une illustration judicieuse et élégante. Grâce à ces livres, et selon une démarche propre au siècle des Lumières, les disciplines scientifiques les plus abstraites devenaient compréhensibles pour le public bourgeois et aristocratique. À l’instar de la traduction de Newton par la marquise du Châtelet, la science n’était plus réservée à l’élite intellectuelle de l’Europe formée en République des Lettres. Outre le célèbre Traité des arbres fruitiers (1768), Duhamel de Monceau est aussi l’auteur de multiples ouvrages de sylviculture (Des semis et plantations des arbres, et de leur culture (1760), Traité des arbres et arbustes qui se cultivent en France en pleine terre (1760 aussi)) ou sur la pêche (Traité des pesches, et histoire des poissons, 1769), et de bien d’autres textes. Dès l’âge de vingt-huit ans, il était entré à l’Académie des sciences où il conduira à son terme la publication, longue et tourmentée, de la Description des Arts et Métiers, après l’avoir relancée en 1757.
Devenu inspecteur de la Marine en 1739, Duhamel de Monceau réunira une importante collection de maquettes de bateaux aujourd’hui conservée au Musée de la Marine. Chacune d’entre elles servait à l’enseignement. En 1741, Duhamel de Monceau avait en effet fondé l’école de marine à Paris qui deviendra plus tard l’École du Génie Maritime. Les élèves constructeurs, sélectionnés dans les ports, recevaient durant trois ans un enseignement scientifique déterminant pour la construction à venir des bateaux de la Marine royale française. On doit en partie à Duhamel de Monceau cette renaissance de la puissance maritime qui permit à la France de Louis XVI de jouer un rôle capital dans la guerre d’Indépendance des États-Unis. Les Élémens d’architecture navale forment le résumé des cours de Duhamel de Monceau. Ils sont ainsi, par leur clarté, dotés d’une grande vertu pédagogique. L’ouvrage est complété d’une superbe illustration : “il a permis de faire sauter le verrou de la confidentialité en matière de construction navale en mettant à jour les « secrets » des constructeurs jusque-là jalousement protégés” (Musée de la Marine). Le succès de l’ouvrage fut considérable.
L’éphémère Tsar Paul Ier (1754-1801) ne régna que cinq ans de 1796 à son assassinat en 1801. Le futur Paul Ier et sa femme, la belle Sophie-Dorothée de Wurtemberg (1759-1828) épousée en 1776, avaient effectué en 1781, sous le nom de comte et comtesse du Nord, un fameux voyage en Europe qui les avait conduits pour plusieurs mois en France où leur visite connut un triomphe. Ce séjour est décrit avec précision dans les Mémoires de la baronne Henriette d’Oberkirch. Sans doute est-ce à cette occasion qu’ils acquérirent de nombreux livres français. La marine et la construction navale attiraient l’attention de Paul Ier. Il fut celui qui s’allia aux Turcs pour faire traverser les Détroits à sa flotte. Il l’envoya prendre Corfou et les îles ioniennes aux Français en mars 1799 avant de rompre son alliance avec l’Angleterre pour finir sans doute assassiné par ses agents dans la nuit du 24 mars 1801.
Paul Ier et Sophie-Dorothée, alias Maria Feodorovna, aimaient beaucoup les livres. À Pavlovk, qu’elle avait meublé avec grand goût, chacun possédait sa propre bibliothèque. Après l’assassinat de son mari, les livres de Paul Ier furent déplacés au palais de Gatchina que la grande Catherine avait donné à Maria Feodorovna. Conservés comme un bloc homogène, ils furent néanmoins vendus dans les fameuses ventes des soviets dans les années 1920.
J.-C. Brunet, Manuel du libraire, II, col. 872 -- voir les différents articles du Dictionnaire de Port-Royal sur la famille Duhamel, pp. 366-369 -- M. Afanassiev, “La vente de livres anciens par le gouvernement soviétique dans les années 1920-1930”, Bulletin du Bibliophile, 2006, 2, pp. 350-369
WEBOGRAPHIE : sur les différentes bibliothèques impériales, cf. https://worldart.news/2022/02/07/how-russian-czars-library-ended-up-in-america/